Si son entourage n’utilise pas les termes de « non-binarité » ou de « transidentité », il est peu probable qu’un enfant de 3 ou 7 ans utilise ces mots. Mais il peut tout à fait dire des phrases comme :
“Je ne me sens ni fille ni garçon.”
“Je suis les deux.”
“Je ne suis pas comme les autres filles / garçons .”
Si un enfant aborde ce sujet de lui-même, qu’il s’interroge sur les termes à employer et qu’il vous pose des questions, c’est qu’il est prêt à entendre les réponses et à recevoir un accompagnement adapté. Sa parole mérite d’être prise au sérieux, quel que soit son âge.
1. Écouter avant de répondre. Reformuler pour instruire.
Avant de chercher à expliquer ou corriger les termes employés, commencez par écouter. Posez des questions ouvertes comme :
- “Qu’est-ce que ça veut dire pour toi ?”
- “Comment tu te sens quand tu dis ça ?”
L’objectif est de comprendre ce que l’enfant exprime, pas de lui coller une étiquette ou de la lui retirer. Les enfants peuvent explorer leur genre de multiples façons, et changer d’avis ne signifie pas que leur ressenti précédent était “faux”.
Lorsque vous pratiquez une écoute active, vous pouvez reformuler les paroles de votre enfant, en employant des termes plus adaptés. C’est une correction naturelle qui n’amène pas d’humiliation. Exemple : Si l’enfant dit : « j’adore les chevals blanc », vous répondez naturellement sans lui faire remarquer l’erreur : « ha super, j’adore savoir que tu aimes les chevaux blancs ! ». Ici c’est la même chose qui s’applique pour le vocabulaire de la transidentité : « je suis ni une fille, ni un garçon » = « d’accord, tu te situes en dehors de la binarité ».
2. Éviter toute forme de moquerie ou de dénigrement
Dire “c’est n’importe quoi” ou “tu es trop petit pour savoir” invalide ce que l’enfant ressent. Cela peut lui envoyer le message que ses émotions, ressentis et ses réflexions ne sont pas valables, et l’inciter à se taire à l’avenir. Même une remarque faite “à la légère” peut laisser une trace durable. Prenez le toujours au sérieux.
3. Rassurer sur l’accueil et la sécurité
L’enfant doit savoir que votre amour et votre soutien sont constants. Mais il doit aussi sentir que vous vous intéressez, que vous avez réellement la volonté de comprendre qui il est, comment il se sent, etc.
“Je veux vraiment comprendre qui tu es, parce que c’est important pour moi, et je t’aimerai toujours, quelle que soit la réponse.”
peut avoir un impact immense sur sa confiance et sa sécurité émotionnelle.
La posture parentale est un positionnement politique : dans une société transphobe, la neutralité n’existe pas. Donc on évite des phrases comme « peu importe comment tu te sens, je t’aimerais toujours ». Ici le « peu importe » envoie le message qu’on s’en fout, qu’on n’essaye pas de comprendre véritablement qui est l’enfant et de s’intéresser à lui et à ses ressentis/émotions/besoins etc.
4. Éviter d’anticiper des changements à sa place (ou de les freiner)
Accompagner ne signifie pas précipiter. Il n’est pas nécessaire de tout changer immédiatement selon votre interprétation et votre vision de l’identité de genre (pronoms, prénom, vêtements, etc.), sauf si l’enfant en fait explicitement la demande et que cela améliore son bien-être. Ce n’est pas votre rôle de savoir ce qui pourrait lui créer de l’euphorie ou de la dysphorie de genre. L’important est de rester à l’écoute et d’avancer à son rythme. En fait votre rôle de parent est plutôt d’informer sur la réalité de ce que vivent les personnes non-binaires, puis, en entendant ces témoignages, cela fera surement écho à ce que vit votre enfant et c’est à ce moment qu’il demandera par exemple de, lui aussi, changer de pronoms, changer de style… ou rien de tout ça. C’est en ça que la visibilité et représentation trans sont nécessaire et vitale pour les personnes concernées.
5. Fournir des repères adaptés à son âge
On peut expliquer simplement que certaines personnes se sentent filles, d’autres garçons, et d’autres ni l’un ni l’autre, ou toute autre combinaison des deux. Utiliser des livres jeunesse adaptés, des dessins animés ou des exemples réels aide l’enfant à comprendre qu’il n’est pas seul.
Le Livre Non Binaire – Audrey Jésus / Anna Winter
Un livre pour aborder la non-binarité. Visibilité et représentation trans dans la bibliothèque de votre enfant !
6. Réparer nos erreurs / prendre soin pour éviter les traumas
Etre trans c’est « ne pas être cis ». Et être cis, c’est être en accord avec le genre qu’on nous a assigné à la naissance. L’identité de genre est donc à la fois culturelle et identitaire.
Malheureusement, le genre, dans notre société est binaire : soit garçon, soit fille. En France, en 2025, il n’est pas donc pas possible d’être cis et non-binaire. Et c’est un peu de notre faute (à nous, les parents), mais aussi surtout de la faute de la société. Parce que même les quelques parents qui ont la volonté d’offrir une éducation non-genrée à leur enfant, ne peuvent pas échapper aux médias, à notre culture genrée, et aux réflexions extérieures, ce qui vient forcément façonner la vision du genre de l’enfant, et donc sa perception de lui-même.
Donc tous les enfants non-binaires sont trans, et vivent forcément une période où la société les aura mégenrés. Pour certains enfants, cela peut être synonyme de mal-être.
Je dis souvent que un trauma peut être évité (ou en tous cas qu’on peut minimiser son impact) lorsque son auteur cherche à réparer le mal qui a été causé, puis prendre soin de la personne, des endroits en elle qui ont besoin d’être réconfortés, ainsi que prendre soin de la relation en cherchant à s’améliorer. Et en tant que parent, même si nous ne sommes pas entièrement responsables des défaillances et de la transphobie de la société, je trouve ça important de verbaliser à son enfant qu’on est conscient que l’environnement et l’entourage ont été blessants, que ce n’est pas juste, qu’on en est sincèrement désolé, et qu’on aurait aimé que ce soit autrement.
7. Se renseigner pour mieux soutenir
Si vous n’êtes pas sûr de la terminologie ou des enjeux, documentez-vous auprès de ressources fiables : associations LGBTQIA+, professionnels formés, témoignages de personnes concernées. Plus vous êtes informé·e, plus vous pourrez accompagner sans jugement.
En résumé
Un enfant qui parle d’identité de genre exprime un ressenti réel. L’écouter, le respecter et l’accompagner sans violence éducative ni jugement, c’est lui offrir un environnement où il pourra grandir en confiance et en sécurité, en étant fier de son identité.